Histoire

La crème glacée expliquée

Vous connaissez probablement les glaces industrielles des Etats-Unis. Peut-être avez-vous eu la chance d’aller en Italie et d’avoir pu goûter les fameuses gelati. Peut-être connaissez-vous également le kulfi, cette crème glacée indienne à base de lait. Peut-être, comme moi, vous êtes curieux : comment une crème glacée est faite ? Quelle est son histoire ?

Nous savons que l’origine de la glace est ancienne : elle est mentionnée dans la bible, elle était consommée dans l’antiquité en Grèce et en Italie… Mais ces glaces étaient différentes des crèmes glacées actuelles : cela ressemblait plus à de la glace pilée, ou de la neige, aromatisée avec du miel, du vin… L’une des crèmes glacées qui ressemble le plus à nos glaces modernes date de la dynastie Tang (618-907 ap. JC), en Chine, et elle était principalement composée de lait et de farine. La crème glacée a ensuite fait son arrivée en Europe au 17e siècle, d’abord maitrisée par les italiens, puis par les français, qui ont commencés à ajouter un ingrédient : des jaunes d’oeufs. C’est à cette époque qu’on trouve les premières recettes de crèmes glacées. Elle a ensuite été exportée aux Etats-Unis vers le 18e siècle où elle connaît un succès massif.

Aujourd’hui, pour faire des glaces, généralement on utilise un réfrigérateur. Mais je suis plutôt sûre que nos ancêtres n’en avaient pas puisque l’invention de ce dernier remonte au 19e siècle… Comment faisaient-ils ?

D’abord, il faut préparer la crème glacée, et ce procédé est découpé en trois étapes. D’abord, il faut préparer un mélange d’ingrédients, donc principalement de la crème et du sucre. On peut aussi ajouter des jeunes d’oeufs, comme dans la gelato, qui rendent la crème glacée plus riche. On a alors besoin de cuire la mixture au préalable. D’autres ingrédients peuvent être ajoutés comme du lait condensé ou du sirop de maïs. Pour les glaces commerciales, la mixture est d’abord pasteurisée et tous les mélanges contenant des jaunes d’oeufs sont cuits.

L’étape qui vient ensuite est de refroidir ce mélange pour accélérer le processus. Avant l’invention du congélateur, le mélange était mis dans un récipient entouré d’un liquide refroidissant. C’est là que vient le problème. Pour refroidir la glace on a besoin d’un liquide qui soit en dessous de 0°C car la crème sucrée gèle en dessous de 0°C. Or, l’eau passe de liquide à solide à 0°C : ce n’est pas assez froid. La solution consiste à ajouter du sel dans les blocs de glace qui sont autour du récipient contenant la crème glacée. Le sel empêche l’eau de se solidifier à 0°C, et on obtient donc un liquide réfrigérant qui est en dessous de 0°C. Ce phénomène était connu dès le 13e siècle ap. J.C. puisque Ibn Abi Usaybi’a, un médecin originaire de Syrie, décrivait ce procédé dans un de ses ouvrages.

 

Capture d’écran d’une vidéo youtube où Ann Reardon recrée une recette de crème glacée datant d’il y a 200 ans. On voit donc le récipient avec la crème glacée entouré de blocs de glace mélangés avec du sel.
Capture d’écran d’une vidéo youtube où Ann Reardon recrée une recette de crème glacée datant d’il y a 200 ans. On voit donc le récipient avec la crème glacée entouré de blocs de glace mélangés avec du sel.

 

 Il faut ensuite mélanger et remuer le mélange le plus en continu possible : cela permet d’éviter la création de gros cristaux de glace et au contraire d’en créer des plus petits. Plus le mélange est refroidi rapidement et est mélangé, plus la texture de la glace sera douce sur la langue. Cette étape ajoute aussi des bulles d’air dans la crème glacée qui jouent sur le volume de la glace : parfois la crème glacée peut être composée de 50% d’air et 50% de crème. Plus ce pourcentage d’air est bas, plus la crème glacée est dense. Par exemple, la gelato et le kulfi ont un pourcentage d’air faible. 

Enfin, la dernière étape est de laisser reposer, sans agiter, la crème glacée maintenant difficile à mélanger pour que le reste de l’eau se transforme en cristaux et solidifie la glace. Mais, toujours pour garder une bonne texture, il ne faut pas que cette étape soit trop lente : pour l’accélérer on peut diviser la crème en plusieurs petits récipients. 

Ainsi, pour faire la meilleure crème glacée possible, il faut maîtriser l’équilibre entre les cristaux d’eau, la crème, et les bulles d’air. Maintenant, peut-être que votre curiosité est assouvie, mais si vous voulez en savoir plus n’hésitez pas à nous poser des questions ou à faire vos propres recherches ! En effet, cet article n’est qu’une vulgarisation de phénomènes physiques et chimiques : la crème glacée a encore plein de choses à vous apprendre.

 

Mes sources principales sont :

On Food and Cooking: The Science and Lore of the Kitchen, de Harold McGee

https://www.pbs.org/food/the-history-kitchen/explore-the-delicious-history-of-ice-cream/ 

-Screenshot issu de la vidéo 200 year-old crazy dessert with BUGS in it, de la chaîne “How To Cook That”