La première bachelière ; une femme inspirante
«XIXe siècle» en France.
Si nous l’évoquons, nous songeons tout de suite à une société patriarcale; à l’avènement de grands changements de régimes politiques ; ou encore, nous pensons évidemment à des écrivains de renom, tels Chateaubriand, Victor Hugo, Émile Zola, et bien d’autres encore. Mais qu’en est-il de la place qu’occupent les femmes ?
En effet, ces dernières sont restées longtemps dans l’ombre de ces hommes qu’elles ont aimés, épaulés, et tout simplement «forgés». Ceux que nous connaissons aujourd’hui comme étant de grandes figures de l’Histoire. Et pourtant, quels ont été leurs remerciements ? Eh oui, la progressive négligence de leurs actions :
fruit résultant de l’arbre de la misogynie et de la sous-estimation de toutes ces figures remarquables.
C’est pourquoi aujourd’hui, je vous propose de découvrir le portrait d’une femme des plus merveilleuses. Une femme qui a fait fi de tous les stéréotypes inimaginables de son temps. Une femme, dont le tableau a été dressé par ses faits et gestes. Il reste encore pour certains sous l’ombre d’un voile, et c’est justement ce voile que je vous propose d’ôter dans ce numéro.
Ainsi, découvrons la figure, les traits de : Julie-Victoire Daubié.
Entrevoir les prémices d’un destin prodigieux…
Tout commence le 26 mars 1824 pour Julie-Victoire née dans la maison des Commis de la Manufacture royale de Bains-les-Bains, au sein d’une famille dénombrant déjà sept enfants. Élevée dans le milieu de la petite bourgeoisie, elle grandit entourée de l’amour dont font preuve ses frères et sœurs ainsi que le reste de sa famille. Néanmoins, cette dernière ne connaîtra pas les cajoleries qu’un père témoigne à ses enfants, celui-ci ayant rendu l’âme, alors qu’elle n’est âgée que de vingt mois. Concernant son enfance, celle-ci baigne toutefois dans la sérénité et est rythmée au fil des saisons. Cette dernière suit une éducation des plus correctes, et à l’instar de ses frères et sœurs, prend part au catéchisme. Il faut également savoir qu’elle ne se contente pas d’une éducation «ordinaire». En effet, elle apprend et acquiert assez aisément d’excellentes notions de grec et de latin, notamment grâce à l’un de ses frères, ce dernier occupant alors des fonctions ecclésiastiques.
Le temps avançant , Julie est à présent une jeune adulte de 20 ans, lorsque, en 1844, elle se consacre à l a rédaction d’une œuvre, dont les critiques seront en 1859, à l’Académie des Lettres de Lyon, très élogieuses, et recevra bien entendu le premier prix. Intitulé : «La Femme Pauvre au XIXe siècle ». Cet ouvrage pourrait être considéré de nos jours comme étant un livre de «science sociale», car à travers celui-ci, Julie nous rapporte les conditions de vie et de travail de la femme d’une manière des plus
réalistes qui soit. Telle une journaliste, elle se rend sur les lieux où son roman se déroule, donnant ainsi un élan de vérité à son histoire. Il faut que vous sachiez aussi
que la même année, elle obtient le « certificat d’enseignant», sorte de brevet indispensable afin d’exercer la fonction de professeur, au niveau primaire : de quoi rabaisser ces médisants messieurs qui pensent qu’une femme est moins expérimentée qu’eux !
Mais bien entendu, notre jeune érudite n’a pas fini de s u r p r e n d r e s e s contemporains et d’attiser la flamme de l’espoir chez les femmes qui imaginent une nation qui se voudrait plus égalitaire… Pour se mieux délecter d’une apogée… Julie-Victoire ne s’est pas reposée sur ses lauriers, et par conséquent, ne s’est pas limitée à son premier diplôme national et à son œuvre, laquelle, pour la deuxième édition, a une fois de plus reçu le meilleur prix. Eh bien oui, élève, ou plutôt femme studieuse (étant donné qu’à cette époque les femmes ne possèdent pas le droit d’étudier dans une académie), elle s’est exercée et spécialisée dans plusieurs d o m a i n e s , e t p l u s particulièrement dans celui de la biologie. Et ironie de l’Histoire, ces mêmes femmes à qui le droit d’entrer dans une université était interdit, sont autorisées à s’inscrire au concours du très notoire baccalauréat, ainsi qu’à d’autres diplômes d’études supérieures ! De ce fait, c’est en cette journée du 16 aout 1861 , q u e l’Académie de Lyon ouvrent ses portes à Julie-Victoire Daubié : une première pour cette université !
Cette dernière passera ses épreuves dans un local lui étant spécialement dédié. Le lendemain, Julie-Victoire Daubié vient de trouver sa place dans l’Histoire : elle est la toute première femme à obtenir son baccalauréat. Mais on peut dire que notre paroxysme d’extase à son égard à encore bien des sommets à atteindre puisque cette prodigieuse femme de 34 ans est justement en train de poursuivre ses études supérieures pour obtenir une licence de Lettres, et par la même occasion, d’estomper ces vils becs crochus que sont la misogynie et la spéculation.
En avril 1872, après des mois de dur labeur, Julie se voit décerner sa licence de Lettres, enchaînant une fois de plus le succès. Néanmoins, pourquoi se contenter d’un acquis lorsque l’on est capable d’atteindre l’excellence ?
Vous l’aurez compris, Victoire va de ce pas s’empresser d’élaborer sa thèse de doctorat, laquelle aura pour thème « La Condition de la Femme dans la société romaine». Un projet ambitieux, vous en conviendrez. Cependant, celui-ci ne verra jamais le jour. En effet, de bien sombres et funestes heures arpentent les couloirs de la
vie de Julie, flairant le meilleur moment pour lui insuffler une peur, que dis-je une hantise que toute l’humanité possède depuis la nuit des temps. Le 25 août 1874, ne début de soirée, Julie-Victoire Daubié succombe à la tuberculose, maladie on peut le dire, qui aliène à toute une nation l’un de ses plus fidèles sujets, sinon patriotes.
Après une myriade de combats, tous plus symboliques les-uns que les autres, Julie trouve enfin le repos tant mérité auprès de sa sœur et ses nièces, personnes qui comme les autres membres de sa famille, ont toujours eu des liens indéfectibles à son égard. Ainsi, en ce cette journée du 28 août 1874, la lignée Daubié dit au revoir à l’un de ses proches, qui pourrait être considéré comme étant l’égérie de sa famille (Julie incarnant une sorte de profonde humilité, on peut être réticent quant à cette appellation). Pour qui sonne le glas ? Certainement pas pour Julie-Victoire Daubié qui, en 50 ans de vie et même bien au-delà, ne cesse, pour certains, d’être la Muse du féminisme. C’est donc avec le destin fabuleux de Julie-Victoire Daubié, féministe avant l’heure, toujours férue d’en apprendre davantage, que je propose de vous quitter. J’ai espoir que le nom de cette icône féminine restera gravée dans votre mémoire et que, de facto, vous contribuerez à faire perdurer son souvenir.
Maxime
Définitions :
Misogyne : Qui hait les femmes
Fi : (ici) Ignorer
Prémices = Les débuts
Cajoleries : Paroles ou manières tendres et caressantes
Erudite : Qui a des connaissances approfondie dans un ou plusieurs domaine ( très cultivé )
Paroxysme : Le plus haut degré
Vil : Qui a peu de valeur
Myriade : Quantité immense